Le dialogue inter-religieux. Histoire, cultures et lien social

Un colloque organisé par l’IEFR se tiendra à l’Université d’Artois, Arras, les 12 et 13 octobre 2017.

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Capture d’écran 2016-12-12 à 13.57.11L’Institut d’études des faits religieux (IEFR), dans le cadre d’un cycle de réflexion et d’études sur la rencontre entre les religions, organise un colloque international sur la notion complexe de dialogue inter-religieux.

Nous vivons, depuis les années soixante, une ère de promotion de la « culture du dialogue ». Dialogue entre les Églises, dialogue inter-religieux, mais aussi dialogue social… La pratique du dialogue s’est imposée progressivement comme la garante d’une paix sociale, et pour ainsi dire le complément indispensable à toute pensée française de la laïcité. Si l’expression « culture du dialogue » s’est laïcisée depuis les années 1960, il faut rappeler qu’à l’origine, elle fut d’abord utilisée dans les milieux œcuménistes chrétiens, puis dans ceux du dialogue inter-religieux, avant d’être adoptée par d’autres milieux, non confessionnels.

Le christianisme, en ses différentes traditions, a cherché à définir en quoi consiste cette « culture du dialogue ». S’inscrivant dans le mouvement lancé au moment du second Concile de Vatican, l’Église catholique s’est particulièrement montrée volontaire dans ce domaine, en définissant le dialogue inter-religieux comme une condition nécessaire à la paix sociale (Evangelii Gaudium, 2013), et en cherchant à comprendre la place de « la culture du dialogue dans un monde globalisé » (thème de la rencontre interreligieuse entre catholiques et musulmans, organisée à Tripoli en 2002).

L’évolution des pratiques du dialogue inter-religieux depuis le début des années soixante interroge cependant. S’il a toujours été entendu que ce dialogue pouvait comprendre plusieurs niveaux, à la fois de rigueur et de convivialité, il semblerait que le plébiscite des médias et du pouvoir public aux formes démonstratives de rencontre interreligieuse ait produit ses effets sur la « culture du dialogue », bien souvent limitée à son aspect social.

Le dialogue théologique, exigeant et encadré, ne constitue pas la seule voie de rapprochement entre fidèles de communautés religieuses différentes. D’une certaine manière, sa haute exigence intellectuelle et spirituelle le pose en exception dans le champ des rencontres interreligieuses. Ainsi, le document « Dialogue et Annonce » (1991), écrit conjointement par la Congrégation pour l’évangélisation des peuples et le Conseil pontifical pour le dialogue inter-religieux, distingue-t-il quatre formes de dialogue entre religions : le « dialogue de la vie », où les gens s’efforcent de vivre dans un esprit d’ouverture et de bon voisinage, le « dialogue des œuvres », où il y a collaboration en vue du développement intégral et de la libération totale de l’homme, le « dialogue des échanges théologiques », où des spécialistes cherchent à approfondir la compréhension de leurs héritages religieux respectifs et à apprécier les valeurs spirituelles les uns des autres, et le « dialogue de l’expérience religieuse », où des personnes enracinées dans leurs propres traditions religieuses partagent leurs richesses spirituelles. Notre colloque entend s’intéresser aux deux premières formes de dialogue définies par ce document, et à leurs réalisations dans le champ du lien social.

Notre postulat de départ est le suivant : la notion de dialogue inter-religieux, dont la genèse remonte aux années 1950 et 1960, semble aujourd’hui victime de son succès. Le langage médiatique et politique l’utilise sans précaution pour désigner des pratiques qui relèvent plus de la construction du lien social que du rigoureux dialogue de foi. Plus qu’à son tour, la notion de dialogue inter-religieux est invoquée et utilisée pour nommer des positionnements insuffisamment questionnés. Tout se passe comme s’il y avait aujourd’hui une contamination du dialogue inter-religieux par l’idéologie du « vivre-ensemble ». Cette dégradation fait courir le risque de vider de toute substance une notion pourtant complexe en la réduisant à une cohabitation qui n’impliquerait pas d’effets intra-religieux.

En réaction à cet état de fait, il nous apparaît urgent d’étudier la genèse complexe de la notion de « dialogue inter-religieux » afin de l’établir en objet de recherche, et d’éclairer ainsi en retour les enjeux et les limites du « dialogue pratique » actuel entre religions. Notre colloque invite, de manière non exhaustive, des historiens, des sociologues, des civilisationnistes et des philosophes, à s’interroger sur l’une des cinq questions suivantes :

1) Peut-on dater ce désir de dialogue inter-religieux, au sein des religions, de la société et des médias ?

2) Sa popularité actuelle correspond-elle à une crise du lien social ?

3) Quelles conséquences a cette notion sur le principe juridique de laïcité; contribue-t-elle à le préciser ?

4) Le dialogue inter-religieux a-t-il des conséquences au sein de chaque religion et des cultures, sur le plan national et international ?

5) Quelles conséquences auraient une définition et une étude claire du dialogue inter-religieux sur la recherche des causes de la radicalisation de certains de nos jeunes (en lien avec les politiques publiques de prévention) ?

Les propositions de communication (3.000 caractères maximum, espaces compris) ainsi qu’une notice bio-bibliographique sont à envoyer à Charles Coutel (charles.coutel@univ-artois-fr), Christophe Leduc (christophe.leduc@univ-artois-fr) et Olivier Rota (olivier.rota@univ-artois-fr) avant le 15 mars 2017. Nous vous demandons de relier explicitement votre proposition à l’une des cinq entrées mentionnées.

Responsables scientifiques : Charles Coutel (Université d’Artois, CDEP), Christophe Leduc (Université d’Artois, CREHS) et Olivier Rota (Université d’Artois, T&C)

Comité scientifique : Cécile Carra (Université d’Artois, LEM), Danielle Delmaire (Université de Lille 3, CECILLE), Charles Giry-Deloison (Université d’Artois, CREHS), Jan Goes (Université d’Artois, Grammatica), Charles Mériaux (Université de Lille 3, IRHiS), François Raviez (Université d’Artois, T&C), Catherine Vialle (Institut Catholique de Lille, Anthropologies théologique et philosophique) et Anne-Gaëlle Weber (Université d’Artois, T&C).

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